Mise au point
Allergie aux fruits à coque chez l’enfant : quelle prise en charge en pratiqueTree nuts allergy in children: How to manage it in clinical practice

https://doi.org/10.1016/j.reval.2024.104167Get rights and content

Résumé

Les fruits à coque sont des allergènes végétaux fréquemment en cause dans les réactions allergiques aux aliments chez l’enfant. Parmi eux la noix de cajou, la noix, la noisette, la pistache et l’amande sont les plus incriminés dans les manifestations cliniques parfois anaphylactiques. Le diagnostic d’une allergie aux fruits à coque est simple et repose sur l’interrogatoire, les tests cutanés, l’utilisation des supports biologiques (IgE spécifiques, allergologie moléculaire). La recherche d’une réactivité croisée ou associée est indispensable, entre fruits à coque mais également avec l’arachide et le sésame. Il devrait être possible de se dispenser, dans certains cas, de tests de provocation orale pour explorer ces réactivités croisées potentielles. Des protocoles d’immunothérapie orale, surtout pour la noisette, la noix de cajou, la pistache ou la noix se développent.

Abstract

Tree nuts are plant allergens frequently involved in allergic reactions to food in children. Among them, cashew, walnut, hazelnut, pistachio and almond are the most implicated, with sometimes anaphylactic reactions. The diagnosis of an allergy to nuts is simple and is based on history, skin tests, and biological assessment (specific IgE, molecular allergology). Cross-reactivity should be searched, between nuts but also with peanuts and sesame. It should be possible not to perform an oral food challenge in all cases to explore these potential cross-reactivities. Oral immunotherapy protocols, especially for hazelnuts, cashews, pistachio and walnuts are being developed.

Introduction

Les bienfaits nutritionnels des fruits à coque (FAC) (richesse en magnésium, calcium, sélénium, etc.) et leurs vertus antioxydantes (grâce à la présence omégas ω 3, 6 et 9) ont eu pour conséquence une majoration de leur consommation dans la population générale. Ces modifications d’habitudes alimentaires ont vu augmenter le nombre d’allergies aux FAC dans les pays occidentaux, particulièrement chez l’enfant [1]. Il existe cependant des variations importantes de prévalence d’un pays à l’autre (de 0,05 % à 4,9 %), fonction des méthodes d’évaluation (âge, autoreport, sensibilisation, test de provocation par voie orale-TPO−) et des habitudes de consommation propres à chaque pays [1], [2]. L’étude ELFE, cohorte prospective multicentrique néonatale issue de la population générale incluant 16,400 enfants, a permis d’estimer par questionnaire l’incidence de l’allergie aux fruits à coque en France à 0,54 % à l’âge de 5,5 ans, plaçant cette allergie en 5e position par sa fréquence [3]. L’allergie à la noisette est la plus fréquente en Europe de l’Ouest, alors que la noix et la noix de cajou sont plus fréquentes aux États-Unis [4], [5], [6], [7], [8]. Il s’agit en général d’une allergie « princeps » chez les enfants de moins de 5 ans, via une sensibilisation aux protéines de stockage, potentiellement transcutanée [9] ; chez l’adulte, elle est soit persistante depuis l’enfance ou peut apparaître de novo via une sensibilisation PR10 chez les patients polliniques, notamment pour la noisette. Le potentiel estimé de guérison spontanée est faible, environ 9 %. Enfin, elle peut être à l’origine d’anaphylaxies sévères voire létales, 55 à 87 % des décès par anaphylaxie étant dus à l’arachide ou aux fruits à coques dans les données de registres [7], [8], [10], [11]. L’impact de ces allergies sur la qualité de vie est non négligeable dans la mesure où les FAC rentrent dans la composition de nombreuses pâtisseries, confiseries, fromages végétaux affinés, et que la mode des régimes végétaliens risque d’en augmenter la fréquence [12], [13].

Section snippets

Les allergènes des fruits à coques

Les huit fruits à coques (FAC) les plus fréquemment consommés dans le monde sont l’amande, la noisette, la noix, la noix de macadamia, la noix du Brésil, la noix de pécan, la noix de cajou et la pistache. La noix du Queensland a une origine commune avec la noix de macadamia et elles sont souvent assimilées. Le Tableau 1 résume les caractéristiques principales des FAC en ce qui concerne les familles botaniques dont ils sont issus et leurs principaux composants allergéniques.
L’individualisation

Signes cliniques et diagnostic

Le spectre des symptômes allergiques envers les FAC est vaste : celui-ci va du syndrome oral à l’anaphylaxie. En 2019, selon les données du Réseau d’AllergoVigilance, les fruits à coques représentaient la première cause des cas déclarés d’anaphylaxie (soit 25,9 % des cas impliquant des allergènes végétaux), devant l’arachide (17 % des cas). L’allergène majoritaire dans ces anaphylaxies déclarées était la noix de cajou (48,6 % contre 39,1 % en 2018). Rapportée au nombre de cas totaux de 2019, la

La place du test de provocation par voie orale

Dans ce contexte, la réalisation d’un test de provocation par voie orale (TPO) reste nécessaire dans deux circonstances. La première sera de confirmer le diagnostic, notamment en cas de sensibilisation sans consommation antérieure connue. En complément au travail de Brough et al. [5], Elizur et al. proposaient de réduire la fréquence de recours aux TPO dans l’exploration des réactivités croisées entre FAC [27]. Pour ces auteurs, chez les patients cosensibilisés envers la noix et la noix de

Principes généraux

La prise en charge d’une allergie aux FAC obéit aux règles générales propres au suivi des AA chez l’enfant. L’éviction, bien que difficile, est facilitée par la législation qui oblige les industriels à indiquer de façon évidente la présence des FAC dans la composition des aliments qu’ils proposent. En effet, les FAC font partie des 14 allergènes à déclaration obligatoire [28], [29]. Les huiles de noix et de noisette doivent être également évitées car elles peuvent être insuffisamment raffinées

Conclusions

L’allergie aux fruits à coque est particulière au sein des allergies alimentaires de l’enfant par sa fréquence, sa sévérité potentielle et l’existence de nombreuses réactivités croisées possibles obligeant à un bilan exhaustif. La prévention primaire reste complexe et l’introduction précoce des FAC dans la diversification demande des preuves complémentaires de son efficacité et innocuité. Des protocoles d’ITO se développent avec des résultats encourageants.

Déclaration de liens d’intérêts

F.A. Activité de conseil (Stallergènes Greer). L’auteur (Elodie Michaud) conférencière (AImmune Therapeutics, ALK Abello).

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